Un entrepreneur spécialisé est engagé par un entrepreneur général pour des travaux de fondation devant être exécutés durant l’automne. La valeur du contrat de sous-traitance s’élève à 800 000 $ et les travaux sont préalables et essentiels aux travaux de structure. Les travaux sont réalisés à 40 %. Jusqu’à ce jour, une somme d’environ 300 000 $ a été payée à l’entrepreneur spécialisé. Toutefois, l’entrepreneur général est en défaut de paiement de 40 000 $. Le lundi, ce dernier est mis en demeure de payer cette somme, sous menace que le contrat soit résilié par l’entrepreneur spécialisé, tel que le permettent les clauses contractuelles. L’entrepreneur général considère que seul un montant de 25 000 $ est dû. Le lendemain, mardi, il rend disponible un chèque de ce montant en échange de la signature d’une quittance partielle et d’une déclaration statutaire. Des correspondances sont échangées entre les procureurs des deux parties. Une semaine plus tard, l’entrepreneur général confirme que le paiement des travaux est garanti par un cautionnement. Ce même jour, l’entrepreneur spécialisé transmet un avis de résiliation. Le lendemain, il cesse les travaux et le surlendemain, enlève ses équipements du chantier. L’entrepreneur spécialisé peut-il être contraint de poursuivre les travaux alors que son contrat lui permet, en cas de défaut de paiement par l’entrepreneur général, de suspendre l’ouvrage ou de résilier le contrat sur avis écrit de 5 jours ?
Oui. C'est ce qu'a conclu la Cour supérieure dans son jugement sur la requête en injonction présentée par l'entrepreneur général.
Précisions que dans le cadre d'une telle requête, le juge ne se prononce pas sur le fond de l'affaire, à savoir ici si l'entrepreneur spécialisé a exercé de manière raisonnable son droit de résilier son contrat. Pour donner droit à une requête en injonction, le juge doit constater qu'il y a une situation d'urgence, qu'il y a apparence de droit ou une question sérieuse à débattre, qu'il y aura un préjudice irréparable si l'injonction n'était pas accordée et que la balance des inconvénients milite en faveur de la partie qui la demande.
Dans cette affaire, la question à débattre était sérieuse : l'entrepreneur spécialisé a-t-il agi de bonne foi ou de manière excessive ou déraisonnable en résiliant son contrat? Selon le juge, il était urgent que les travaux soient exécutés. D'abord parce que la période de gel approchait et parce que, sinon, des retards s'accumuleraient. Comme l'entrepreneur général n'arrivait pas à trouver un autre entrepreneur spécialisé pour poursuivre les travaux, si l'injonction était refusée, certains dommages ne pourraient pas être réparés, et ce, même si l'entrepreneur général obtenait gain de cause plus tard. Dans le contexte où le paiement de l'entrepreneur spécialisé était garanti par un cautionnement, la balance des inconvénients favorisait l'entrepreneur général.
En conséquence, la Cour a ordonné à l'entrepreneur spécialisé de se remobiliser sur le chantier afin de poursuivre l'exécution du contrat.
Cette page répond-elle à vos besoins?